Du storytelling au storyselling

Jeremy Dahan - Agence Globe

Face à un consommateur en quête de sens, le storytelling ne suffit plus. Les marques doivent soigner l’expérience d’achat sur tous les points de contact. Il en va de leur survie.

Pendant longtemps, associer un produit à une bonne histoire suffisait à « faire vendre ». Les marques capitalisaient sur leur notoriété et la distribution faisait le reste pour générer des ventes. Un plus grand accès à l’information, la digitalisation et la surenchère promotionnelle ont considérablement modifié le comportement du consommateur. Exigeant et de moins en moins fidèle, il cherche du sens, du concret, des preuves pour accorder sa confiance et passer à l’acte d’achat.

Alors comment transformer l’histoire qui l’accompagnera jusqu’à l’achat ? De la même façon que pour le storytelling : en suivant une structure et une méthodologie éprouvée. La première étape doit nécessairement passer par le développement d’une plateforme shopper qui incarne la plateforme créative suscitant un intérêt pour le produit et la marque. C’est de cette plateforme que naît le concept créatif shopper et que peut être conçue l’expérience qui est devenue le nouveau sésame pour toucher le consommateur. Un constat qui n’a pas échappé au fondateur d’AliBaba, Jack Ma, qui a totalement ré́-inventé le supermarché́ avec sa chaine de magasins Hema et le concept du «new retail».

Développée autour du concept « fresh and live », l’expérience shopper y est sans couture : on y pêche son poisson, on coupe ses herbes fraiches, on ramasse les crustacés et on choisit son chef qui cuisine selon ses propres goûts. Tout est axé sur le plaisir, la personnalisation, l’immersion, les rituels de dégustation et surtout la générosité́ puisque la majorité des services sont gratuits. Un pari gagnant pour AliBaba, qui annonce une rentabilité quatre fois supérieure à la distribution classique sur les 22 supermarchés d’ores et déjà ouverts, et qui prévoit l’ouverture de 2 000 magasins de ce type en Chine, qui serviront aussi de bases logistiques pour les livraisons de proximité… En 30 minutes !

Traduire les insights aspirationnels

On retrouve également ce pari de plus en plus chez les distributeurs français, notamment avec les espaces expérientiels de la Fnac ou les Podiums des hyper Carrefour. Le troisième enjeu est d’accompagner le consommateur dans l’intégralité de son parcours d’achat pour le transformer en shopper et enfin en acheteur. Alors qu’aujourd’hui parcours de vie et parcours d’achat ont fusionné, il s’agit donc de traduire les insights aspirationnels en usages conso concrets pour définir où et quand interagir avec le shopper, pour in fine, et c’est là la dernière étape, déclencher l’achat.

Car le seul et unique objectif du storyselling, c’est bien l’achat en tous lieux (point de vente, e-commerce, drive…), facile, immédiat et ludique dans certains cas. Un achat mesuré, suivi, qui permet de rationnaliser chaque euro investi mieux qu’il ne l’était jusqu’à présent.

Le challenge réside ainsi aujourd’hui dans le développement d’un nouvel écosystème centré sur le shopper. « Décentrage » majeur mais vital. Une marque qui n’implique pas, qui produit sans se soucier des impacts, qui continue à communiquer en monologue, qui s’adresse à ses shoppers comme à des cibles n’a pas de souci à se faire pour son avenir… Elle n’en a pas. A la majorité des autres, bienvenue dans l’ère du shopper marketing.


Tribune Stratégies Newsletter –  en date du 29/10/2018